Crédit photo : Marie-Soleil Cloutier
J’ai envie de te raconter quelque chose ma belle fourchette. Quelque chose que tu sais peut-être ou au contraire, dont tu ne te doutes pas du tout. J’ai souvent l’air de la fille bien sécure, les deux pieds bien ancrés dans la confiance.
Dans les faits, je suis une fille qui fonce dans la vie, mais toujours avec la peur au ventre. Je doute constamment, en fait, je ME remets en doute tout le temps. Mais ironiquement, ça ne m’a jamais empêché de pousser ma machine plus loin. Certes, parfois, j’avance moins vite, mais je fonce quand je sens que c’est le moment de le faire.
Je me rappelle encore quand on m’a proposé de devenir collaboratrice pour Cinq Fourchettes. C’était en 2014. Je me rappelle encore être assise dans mon divan et regarder mon conjoint de l’époque avec un air de « De quessé qu’elle vient de me demander ? ». C’était Gen de son petit nom.
Gen me demandait si j’avais envie d’écrire pour elle. Je ne comprenais pas trop la patente. Je connaissais un peu Gen, mais pas beaucoup. On avait fait du scrapbooking ensemble quelques années auparavant. À go, jugez-moi ! Ha ha ha.
J’avais renoué un peu avec elle sur Facebook parce que j’avais gagné un concours sur sa page. J’avais été l’heureuse élue, gagnante du premier livre de Geneviève Everell. J’étais contente en tabarouette parce que moi, Geneviève Everell, je l’adorais.
Je l’avais engagée chez moi pour une soirée de Sushi à la maison quelques années avant, soit en 2011. Elle était encore seule sur la route. Bref, je me rappelle qu’à cette époque, en regardant Geneviève travailler ses sushis, j’étais bien impressionnée de ses talents culinaires.
Vois-tu à cette époque, je ne cuisinais « fuckall ». Je venais d’une famille qui ne cuisinait pas. J’étais capricieuse fois 1000 pis je commençais à peine à découvrir les saveurs du monde. Les sushis étaient à ce moment-là, ma plus récente découverte. J’l’sais, j’étais en retard sur tout le monde.
Photo de ma Yoda haha qui veut rester anonyme et une photo prise de Geneviève Everell lors de notre première rencontre chez moi !
Bref, combinées à mon désir de cuisiner plus pour ma marmaille, ces deux Gen là ont été sans le savoir, deux femmes bien importantes dans ma vie. L’une étant mon modèle d’entrepreneuriat et de détermination, l’autre mon yoda du web. J’ai donc accepté, encore pour une raison nébuleuse, la proposition de Cinq Fourchettes.
Petit bonhomme allant, j’ai commencé à produire de plus en plus pour la plateforme. Aiguisant au passage mon écriture, mes photos et en développant des habiletés en cuisine. 3 ans se sont passés et un jour, Gen a voulu se départir du site. 5F lui demandait beaucoup trop de temps et d’énergie pour ce qu’elle avait à y mettre.
Quand elle m’a offert de reprendre le contrôle de la chose, j’étais à un moment de ma vie, disons… très chambranlant. J’étais dans un processus de séparation, après 19 ans en couple avec le père de mes enfants. Je n’avais jamais eu de job bien stable mise à part mon petit studio de photo puisqu’on avait fait le choix de vie d’avoir l’un des deux parents à la maison à temps plein avec les cocos.
J’étais comme on pourrait dire, à un point culminant et très stressant de ma vie. J’avais perdu ma mère l’année d’avant. Je me divorçais. Je veux dire dans la catégorie déstabilisée, j’étais dans le top de l’échelle.
Si je ne reprenais pas la charge du site, je perdais du coup mon 2e emploi. J’avais une décision importante à prendre et je l’ai prise rapidement. J’ai finalement acheté Cinq Fourchettes. C’est le gros pari que j’ai fait en 2017 avec pas grand chose en poche. Je me suis lancée dans le vide, sans parachute.
Un gros coup de dés
Un giga coup de dés les amis. Acheter et gérer une plateforme de recettes, moi, la fille qui ne cuisinait pas vlà quelques années. Quand on regarde froidement la chose, c’était un pari risqué. Mais bon, avec toutes mes insécurités et la peur au ventre, je l’ai fait pareil.
J’ai navigué pendant 18 mois avec des doutes constants dans ma tête. Avais-je fait le bon choix ? Suis-je réellement à ma place ? Vais-je être capable de me l’approprier ? Je vous le dis, le syndrome de l’imposteur, à la puissance 10 m’a suivi très longtemps.
Puis… un jour de printemps en 2019, une certaine Nadine du Groupe Librex m’écrivait un petit coucou sur les z’internets. Elle voulait me jaser livre de recettes. Je me rappelle encore avoir regardé l’écran avec la même face que j’ai faite lorsque Gen m’a proposé de collaborer sur 5 F.
Je n’ai pas écouté la petite voix qui me disait « Es-tu folle la grande, tu n’es pas assez qualifiée pour ça. ». Je lui ai donné mon numéro de cell sans trop tarder puis on a jasé. On s’est ensuite rencontré et la confiance qu’elle avait en moi était si forte que ça m’a littéralement donné des ailes.
J’ai accepté un autre pari fort ambitieux de créer un livre de recettes en un temps record. À travers les difficultés, les larmes et les insécurités auxquelles j’ai fait face lors de cette aventure, il y a quelque chose qui s’est transformé en moi.
On dirait que toutes les obstacles qui m’empêchaient de m’épanouir se sont envolées, un à un. Je me suis prouvée à moi-même que rien n’était impossible et que la seule personne qui empêchait les choses d’arriver, c’était moi et mes éternels doutes.
Je me rappelle encore du lancement comme d’un gros Twilight Zone. J’ai passé une partie de la soirée à signer des livres à des gens qui me sont chers, à des médias et à des personnes pour qui je voue un grand respect.
J’écoutais le chef Danny Saint-Pierre parler ce soir-là, devant une foule de gens bien attentifs et je me disais… c’est-tu vrai ce qui se passe? Ça se peut-tu vraiment ? Suis-je arrivée à défoncer des portes et à mettre de côté cette maudite peur de ne pas réussir ou de ne pas être à la hauteur ?
Je me disais réellement à chaque instant : Est-ce que ça se peut vraiment que des compagnies pour qui j’ai un énorme respect se portent volontaire pour m’aider dans cette démarche ? Je veux dire avec toute l’humilité du monde comment était-ce possible que Sweet Isabelle, Provigo, Oliméga, Reitmans et les vins Dandurand me commanditent pour ce moment important de ma vie.
Comment ça se fait que je vis tout ça en plein cœur du superbe restaurant le Capsa (maintenant fermé) avec autant de gens fabuleux ? Comment en suis-je arrivée là ? Je veux dire. Je le sais que je travaille fort. Je le sais que je me donne à fond, mais qui aurait dit ça d’une fille qui peinait à faire une lasagne, il n’y a pas si longtemps que ça.
Je me suis même livrée au jeu de la télévision en direct dans l’une des émissions les plus regardées du Québec. À moins de 48 heures de préavis, je suis allée faire ma petite chronique devant des milliers de téléspectateurs à Salut Bonjour (vidéo ici).
Je suis restée le dos bien droit, déterminée comme jamais à faire taire ma tite voix. Puis, si vous en parlez à mon entourage ou même si vous allez fouiner sur ma chaine YouTube, vous allez voir comment je n’étais pas à l’aise du tout devant l’écran avant. Je vous le dis, ce livre, m’a donné des ailes. Autant au départ, je l’ai sorti pour aider les parents avec le maudit casse-tête des lunchs autant je pense que ce livre m’a aidée plus que qui que ce soit.
Puis ça, j’avais envie de vous dire les amis. Pourquoi ? Parce que sérieusement, si je peux y arriver, vous le pouvez aussi. Je vous lis souvent. Je vous sens parfois dépassés. Vous m’appelez même de temps à autre la chef.
Ça me fait sourire parce que, des fois encore, je me sens comme vous en cuisine. Faque tsé, j’ai envie de vous répéter que si la petite fille timide, qui ne cuisinait pas du tout peut aller cuisiner live à Salut Bonjour, y’a réellement rien d’impossible pour personne.
Le reste, vous le connaissez. Le livre connait un super beau succès. La couverture médiatique est simplement incroyable et les témoignages des gens face à mon livre abondent de toutes parts. Je suis là, à écrire ma pensée face à toute cette vague d’amour que j’ai en me disant… tu sais quoi la grande ?
Je suis fière de toi. Je suis fière d’enfin te voir sur ton X après 42 ans de vie. Y’étais temps que tu débloques fille. Je vais finir ce giga monologue en vous remerciant tout un chacun d’avoir été en quelque sorte des moteurs de cet épanouissement. Chaque personne, bonne ou mauvaise qui passe dans nos vies nous portent plus loin.
Bref, merci à toi, et toi, et surtout toi d’être là au quotidien avec moi ! Et n’oublie JAMAIS que tu es capable de tout. Laisse-toi du temps. Ne cesse jamais d’apprendre. Pose des questions tous les jours et surtout, fais-toi confiance comme tu fais confiance aux autres. Bonne semaine les fourchettes et bonne chance. XXX
Nancy