Depuis que j’ai mis au monde mes enfants, on m’a répété “over and over” cette maudite phrase : « Profites-en ma belle, ça passe si vite ». Quelle phrase gossante à entendre quand tu es sur le mode zombie parce que tu es en manque de sommeil, que tu as quelques gouttes d’urine et de morve dans les cheveux pis que tu viens de marcher sur un autre maudit morceau de Lego. Sérieux, j’entendais ça pis tout ce qui retentissait dans ma tête c’est « bla bla bla bla ». No shit, tu es sérieux en me disant ça ?
Moi, je veux que ça passe vite, qu’il arrête de mettre du papier toilette dans sa bouche, qu’il fasse ses nuits pis surtout qu’il arrête de recracher tout ce que je lui donne à manger. Non, mais là, tsé. Arrête-moi ça, le « ça passe trop vite ». N’IMPORTE QUOI.
Pis là, les années passent. Les câlins et les « maman, tu es la plus belle du monde » se font plus rares. Y’a plus de pissenlit dans mon vase de cuisine. Les Legos au plancher font place aux portes qui claquent, aux yeux qui roulent pis aux éternelles phrases de frufu du style : « Tu ne comprends rien maman ». On ne me donne plus de p’tits dessins de bonhomme allumette, mais plus des factures de magasin de linge à rembourser.
Chaque semaine, tu te dis en regardant tes factures d’épicerie que tu aurais été mieux de demander au gynéco de te prendre un rein au passage pour le vendre au marché noir. Tsé en même temps que de te recoudre le vagin, quant à avoir mal, aussi bien rentabiliser la chose. Ça m’aurait fait un petit fond de roulement.
Pis là, le temps passe encore. Pis une de ces années, tu as ton milieu, 17 ans, qui t’annonce qu’il veut aller étudier à Matane. MATANE, maudine MATANE!!! Tu répètes ça en boucle dans ta tête en retenant tes larmes. Tu vas googler ça sur les z’internets en voulant savoir combien d’heures de route ça te prendrait pour aller le consoler si jamais il panique. Tu regardes ta tite Fiat pis tu te demandes déjà combien de petits plats tu peux mettre dedans pour rentabiliser la route. Tu respires. Tu capotes, un peu, beaucoup. Il finit par te dire qu’en fin de compte ça sera Sorel, ça sera moins loin. Tu es heureuse comme si on venait de t’annoncer que tu gagnais à la loterie. Mais ça reste qu’il va partir. Déjà. Loin de tes yeux, mais jamais loin du cœur.
Les mois passent, trop vite. Oui, trop vite parce que tu sais, on te l’avait dit. Mais tu n’as pas voulu écouter. On y arrive déjà. À moins de 2 mois du jour J, tu brailles de plus en plus. Pis là, venu de nulle part, ton plus vieux te lance : « Hey mom, je m’achète un condo en ville ». Coup de dague en plein dans le cœur. Quoi? Hein ? Toi aussi tu quittes ? Réflexe premier, je serre la main de ma plus jeune avec des yeux qui débordent d’eau. Comme dans un geste de …. Pitié ma puce, reste . Comme si à 14 ans elle allait partir. Mais bon, parfois, y’a aucune logique derrière nos gestes. Là s’en était un de désespoir.
Parce que tsé, on a beau avoir plié un nombre incalculable de bas, de bobettes, de chandail. On a beau avoir saigné notre compte de banque à plusieurs reprises pour offrir le meilleur à nos enfants. On a beau avoir encaissé des coups bas, dictés par les hormones de notre tendre progéniture, penser qu’ils vont partir sous peu, ça fesse. Pis ça fesse fort. Tout d’un coup, je me suis entendu dire à des amis cernés, parents de plus jeune enfant « Os*** profites-en grande, ça passe trop vite ». Je l’ai vu le regard de dépit dans leurs yeux. Le même regard que j’avais moi-même fait à ceux qui me l’avaient dit. Pis j’ai compris que même si on le sait, même si on nous avertit, on s’en rend compte toujours quand c’est trop tard. Je suis chanceuse, j’en ai profité en masse. J’ai eu la chance de passer 16 ans de ma vie en tant que maman à la maison. Ça, c’est précieux. Mais, j’ai encore l’impression de ne pas en avoir assez profité.
Faque là, je me garroche comme une cinglée dans les magasins pour saigner une dernière fois mon compte de banque. Je leur achète des choses aussi utiles qu’inutiles. Je veux, je ne sais pas trop pourquoi, qu’ils aient un peu de moi dans leurs futures maisons. Pis je braille comme jamais avec ma plus jeune. Deux madeleines, deux filles qui font compétition aux chutes Niagara. Deux filles qui vont drôlement s’ennuyer de leurs deux grands blagueurs. Deux filles qui vont se reconstruire une vie à deux. Ça te vide une maison rapidement ça deux déménagements. Ça te préoccupe, jour et nuit. Ça compte les dodos comme des enfants avant Noël, mais sans l’excitation de voir le Père Noël arriver.
L’affaire c’est que mon trio d’enfants est tissé serré. Ça blague sans arrêt. Ça danse dans la cuisine et ça chante en chœur, un chœur de casserole certes, mais un « cœur » tout de même. Pis, ça, ça va me manquer. Je prévois beaucoup d’aller-retour à Sorel et à Lachine. Maman va vous gosser les enfants. Maman va vous apporter plein de petits plats congelés aussi. Attachez d’ailleurs votre tuque, les fourchettes, des recettes à congeler risque d’apparaitre sur le site de façon régulière.
Bref, y’a du changement dans la maison. Vlà deux ans, on était Cinq Fourchettes, dans deux semaines, nous ne serons plus que DEUX. La vie va réellement trop vite. Croyez-moi.
2 réponses
Tu es là où j’étais il y a 2 ans quand ma grande est partie. J’ai laissé la porte de sa chambre fermée 2 semaines, parce que je pleurais trop. Une copine m’a dit que ça irait, ce serait mieux peut-étre. Je me suis ennuyée sans bon sens, mais je l’ai vue grandir, s’épanouir, prendre la maturité dont elle avait besoin. Ma copine avait raison. ????
Oui. Ce sont des étapes difficiles mais on passe à travers clairement. ah ces enfants ! On les aime trop !